Organisation du GDR

Problématiques Générales

Contrôles sensori-moteurs, perception, action et mouvement



Les systèmes de contrôle sensori-moteurs sont au plus près du système physique, de ses capteurs et de ses actionneurs. Leur étude repose sur le traitement du signal et de l’image, l’automatique, l’algorithmique, disciplines que la robotique contribue à nourrir et à développer. Leur couplage, au plus bas niveau, repose sur la compatibilité des modèles de représentation du monde physique avec les algorithmes de planification et de contrôle du mouvement.

Ces systèmes font appel en premier lieu à la perception pour les tâches de commande, de localisation et de modélisation du monde physique dans divers modes de représentation, géométriques, stochastiques, topologiques, ou sémantiques. La fonction de perception s’appuie sur la physique des capteurs et sur le traitement du signal et de l’image. Elle bénéficie des progrès technologiques en matière de capteurs et des progrès méthodologiques et algorithmiques. La diversité sensorielle, tant sur la nature physique du signal que sur les modes de traitement, conduit à des modes de représentation hétérogènes, qui placent aujourd’hui la fusion de données multi-sensorielles comme une des modalités majeures de la perception.

L’étude de l’action par le mouvement s’appuie en premier lieu sur la modélisation et la commande des systèmes. Les robots, qu’ils soient manipulateurs, mobiles, volants, humanoïdes, intracorporels, etc., recouvrent une grande variété de systèmes mécaniques : holonomes ou non holonomes, sous-actionnés ou redondants, de faible ou de grande dimension, voire des compositions de systèmes conçus pour la production d’actions coordonnées complexes. Par ailleurs, l’interaction du système avec le monde physique dans ses composantes géométriques et dynamiques s’appuie sur le couplage entre action et perception (asservissement perceptif), sur l’algorithmique géométrique (planification du mouvement) et la modélisation pour la simulation physique (interfaces haptiques).

La nécessaire intégration des divers modes de traitement de données au sein d’un même système pose ainsi des défis aux trois thématiques, traitement du signal et de l’image, automatique, algorithmique, que la robotique contribue à développer au delà de son champ propre, avec des retombées dans d’autres secteurs de l’ingénierie (réalité virtuelle, imagerie, animation graphique), voire d’autres secteurs comme les sciences du vivant (biomécanique, bioinformatique, neurosciences, neuroéthologie, biologie systémique...).

Cognition, décision, autonomie, apprentissage



Les capacités cognitives de décision, d’anticipation et de réflexivité sont nécessaires pour produire un comportement allant au-delà du schéma purement réactif, et permettant d’accomplir des tâches complexes. Le système robotique perçoit à travers ses capteurs un environnement variable qui n’est a priori pas structuré ni préparé. Il interagit avec lui à travers ses effecteurs. A moins que les tâches soient entièrement préprogrammées et l’environnement invariant et parfaitement connu, le robot doit décider de ses actions sur la base de son interprétation sémantique de l’état de l’environnement et de son propre état, anticiper les états futurs de l’environnement, raisonner sur les conséquences de ses actions, effectuer des choix. Les actions devront être exécutées sans aide extérieure si le robot est autonome, donc être adaptées en temps réel. Ces capacités « cognitives » s’appuient sur des représentations sémantiques qui doivent tenir compte de l’incertitude de l’interprétation et de l’incomplétude de la perception. Elles peuvent utiliser des raisonnements probabilistes ou logiques. La planification d’action doit prendre en compte les contraintes temporelles de durée, d’ordre et d’événement. La mise en oeuvre des actions doit être supervisée et contrôlée par des mécanismes réactifs permettant d’en vérifier l’exécution, et le cas échéant d’en modifier le déroulement en temps réel.

Les connaissances opératoires de planification ou de supervision ne pourront pas toutes être prévues a priori. Des mécanismes d’apprentissage sont donc nécessaires pour permettre l’émergence de nouvelles capacités, l’acquisition de compétences supplémentaires, et l’affinement des compétences existantes. Ces mécanismes peuvent utiliser des techniques d’identification stochastique pour apprendre des modèles d’action, ou bien des techniques de renforcement pour apprendre les actions les plus adaptées. L’apprentissage est en fait transversal à toutes les capacités du robot - tant décisionnelles que perceptuelles - pour l’élaboration de représentations de l’environnement, d’objets, de concepts ou de situations dynamiques.

Les fonctions cognitives et non cognitives de perception, de décision et d’action doivent être intégrées dans une architecture d’ensemble ouverte, mettant en oeuvre des mécanismes d’interaction efficaces entre ses composantes, exhibant des propriétés de délibération et de réactivité à la fois, et permettant l’extension et l’apprentissage ouvert et en continu. L’architecture doit aussi intégrer le dialogue avec l’homme, et la prise en compte des contraintes de sécurité et de lisibilité des actions et des décisions du système robotique.

Interaction et coopération



Le robot n’est pas isolé. Il agit dans un environnement peuplé d’êtres humains, et éventuellement d’autres robots. Il doit donc posséder des capacités conjointes de communication et d’action.

On peut distinguer la coordination (par exemple le partage de la ressource espace par l’évitement mutuel, ou par décision partagée), de la coopération (par exemple pour la réalisation de tâches nécessitant la participation effective de plusieurs acteurs). Les systèmes multi-robots peuvent utiliser des mécanismes d’interaction distribués permettant de gérer la complexité due au nombre. Quand la population est importante (robotique d’essaim) l’émergence de patrons d’interaction collective devient un sujet d’étude.

L’interaction avec l’homme accroît la complexité de l’environnement et sa variabilité. Cette interaction est cognitive et/ou physique. Il est donc nécessaire d’utiliser des modèles des capacités perceptives, des actions et des contraintes bio-mécaniques de l’homme, ainsi qu’une perception multimodale de son visage, de ses gestes, de ses postures et de ses attitudes pour les reconnaître et les interpréter. Le lien avec la biomécanique, la physiologie et la psychophysiologie est ici patent. L’interaction inclut la prise de décision conjointe hommerobot, qui nécessite aussi des modèles rendant compte des rôles et de leur partage, ainsi que le raisonnement à partir d’intentions conjointes.

Conception des systèmes robotiques



Les fonctions de perception, de décision et d'action des systèmes robotiques requièrent l’existence de différents composants matériels tels que des capteurs - notamment ceux utilisant de nouvelles technologies (MEMS...) et de nouveaux matériaux - et des structures innovantes (modulaires, reconfigurables, déployables, souples, élastiques...) pour la locomotion, la manipulation et la préhension, ainsi que des actionneurs conçus sur des principes originaux (matériaux actifs...). Ces composants doivent être compatibles avec les exigences d'échelle de l'application, la méso- et la microrobotique semblant à cet égard encore assez peu explorées.

De nouvelles modalités d'actionnement doivent être étudiées (sous- et sur-actionnement, co-actionnement, actionnement distribué, réversibilité…). Les approches de conception innovantes (par exemple, la biorobotique fondée sur la compréhension du vivant) et d'intégration (mécatronique, adaptronique) sont centrales pour réaliser des systèmes assurant des fonctions complexes tout en satisfaisant les nombreuses contraintes imposées par le domaine d'application considéré (taille, masse, intégration, précision, autoréglage, autoreconfiguration, sûreté de fonctionnement, autonomie énergétique..., mais aussi, par exemple, biocompatibilité, acceptation par la personne...).

La conception des systèmes robotiques revêt également sur un plan architectural, un niveau de complexité considérable. En effet, sous-jacente aux différents aspects évoqués dans les thèmes précédents (commande, perception, décision, planification, interaction, technologie...), se cache l’architecture de contrôle du robot, tant matérielle que logicielle. L’architecture est devenue d’une part un support fondamental à l’intégration de ces travaux divers et d’autre part un facteur essentiel pour répondre à l’adaptation qu’impose l’évolution technologique.
L’évolutivité du robot dépend considérablement de son architecture : réactivité, modularité, réutilisabilité, adaptabilité et analysabilité sont autant de propriétés recherchées, d’autant plus qu’elles rendent possible la mutualisation et l’intégration des travaux de la communauté. Un défi des années à venir est de proposer un référentiel logiciel afin d'adresser cette problématique. Si la tendance est à la promotion de la standardisation d’architectures de contrôle (ouvertes), les réflexions devraient au moins engager vers l’interopérabilité (entre les différents constituants d'une architecture).